Emilie Ledan

L’adaptation des enjeux de Mobilité Internationale au nouveau contexte international

Entretien avec Emilie Ledan , Responsable Mobilités et Expatriations Groupe, Groupe SEB

 

Émilie, quel est votre parcours dans les RH ?

J’ai été diplômée de l’École des Avocats de la Région Rhône Alpes en 2007. Une fois mon diplôme en poche, j’ai rejoint un cabinet lyonnais puis TAJ DELOITTE en 2009 où j’ai intégré l’équipe Global Employer Services. J’y suis restée 9 ans : j’ai gravi les échelons jusqu’à devenir Senior Manager.

Qu’est ce qui fait que l’on passe du conseil à l’entreprise ?

Après 11 ans en cabinet, je me suis dit que ce serait bien de connaître l’envers du décor et de prendre des fonctions opérationnelles, de pouvoir voir l’impact réel des recommandations qu’en tant qu’avocate, je pouvais faire ! En 2018, j’ai eu l’opportunité de rejoindre le Groupe SEB, un Groupe français de renom avec des valeurs fortes auxquelles je m’identifiais.
Je travaille avec Aurore Morel Queron qui gère la partie logistique des mobilités, de mon côté je rédige les contrats, réalise les calculs des package et soumets des recommandations dans les domaines de l’immigration et sécurité sociale. J’ai également la charge de la construction et de l’animation de nos politiques de mobilité internationale.

Comment avez- vous réussi à positionner le département MI en Business Partner ?

Étant intégré à la Direction du Management et des Organisations, le positionnement du pôle MI permettait d’emphaser le fait que la MI est un enjeu stratégique d’attraction, de rétention et de développement des talents pour le Groupe. Le sujet technique de la MI est mis au service d’une approche efficace de la gestion des Talents. Je travaille en collaboration étroite avec les Talent Leaders ce qui me permet de leur apporter mon expertise technique mais également d’être force de proposition dans le domaine de la gestion des talents. Mon rôle de « business partner » est également de faciliter la vie des RH locaux : je les accompagne aussi loin que je peux, nous sommes là en soutien. 

Quels sont les enjeux en terme de télétravail chez SEB ? Quel est votre positionnement ? 

Le Virtual Assignment (télétravail à l’international à la demande de l’employeur) n’est pas une approche privilégiée pour le Groupe SEB pour deux raisons majeures : tout d’abord, il existe des problématiques techniques juridiques et légales qui créent un flou et donc un risque pour le Groupe. Ensuite (et surtout !)  parce que l’expatriation est avant tout une expérience humaine ! Pour « manager » des équipes et comprendre les enjeux locaux et interculturels, il faut se rendre sur place !  Le télétravail à l’international n’est pas vu comme un cadre pérenne mais plutôt comme une solution de repli lorsque, contraints et forcés nous ne pouvons pas faire autrement. Dans ce cas notre message est clair : la situation est temporaire. 
La crise du covid a fait émerger de nouvelles demandes au sein du Groupe en rebattant les cartes : partir à l’international seul, accentuer sur le rotationnel... Ces sujets étaient sous-jacents mais la crise Covid les a mis en exergue. Aussi, depuis trois ans, je m’efforce d’adapter au mieux l’offre de mobilité internationale aux nouveaux enjeux business et gestion des talents : nous sommes passés de trois politiques en 2018 à six politiques en 2021. La segmentation nous permet d’adresser des enjeux personnels divers tout en établissant un cadre clair, efficace et sécurisé d’accompagnement. 

Quels sont vos projets actuels ou à venir ?

Actuellement, je « benchmark » les mesures d’accompagnement de nos politiques. Je souhaite notamment pousser l’accompagnement du conjoint. Nos valeurs familiales fortes nous font tenir compte du fait qu’un départ en expatriation est également un projet familial impactant en plus d’un engagement professionnel fort. Nous nous devons d’accompagner au mieux nos salariés et leurs familles. J’ai beaucoup échangé à ce sujet avec les adhérents du Cercle Magellan pour connaître leurs pratiques. 
L’autre enjeu est le retour d’expatriation. Avec des cycles d’expatriation de 3 années, on s’aperçoit que le retour dans le pays d’origine n’est pas aussi aisé que tout un chacun pourrait l’imaginer. Le monde change et il change rapidement. Le retour dans le pays d’origine ne doit pas être sous-estimé car cela peut constituer un vrai défi en termes de ré-acculturation.  Et ceci est d’autant plus vrai lorsque les expatriés enchainent les missions à l’international !
J’œuvre pour que la MI fasse partie de la marque employeur du Groupe SEB. Je veux que les salariés soient heureux et fiers de partir à l’international avec un accompagnement de qualité.  L’humain est au cœur de ma stratégie MI. Depuis un an, j’ai des échanges téléphoniques réguliers avec les futurs expatriés durant la phase de préparation de leur mobilité, par la suite je les contacte un mois plus tard ainsi qu’à l’issue de la première année. Cela me permet de détecter les signaux faibles.

Comment définiriez-vous votre métier ?

Un iceberg ! Énormément de technicité avec des impacts croisés en fonction des options prises. Je me vois aussi comme une sorte de chef d’orchestre : la fonction MI est au cœur d’un éco système varié : SIRH, administration du personnel, paie, C&B, managers, prestataires externes... et nous tâchons à chaque mouvement de réaliser une symphonie au bénéfice de l’Expatrié et du Groupe.
C’est un métier magnifique, très exigeant, mésestimé parfois. On apprend tous les jours de nouvelles choses, on touche à de l’infiniment intime avec des enjeux personnels forts et c’est en ça que l’on se doit d’apporter un accompagnement de qualité pour permettre aux expatriés de faire de cette expérience un succès. Au-delà de la technicité, la mobilité internationale est éminemment humaine.